Mosaique de la chapelle Redemptoris Mater ,par Marko Rupnik sj

Mosaique de la chapelle Redemptoris Mater ,par Marko Rupnik sj
Mosaique de la Chapelle Redemptoris Mater ,par Marko Rupnik sj

La tâche prophétique de l'agent de communication chrétien

« L'agent de communication chrétien en particulier a une tâche prophétique, une vocation: dénoncer les faux dieux et les fausses idoles d'aujourd'hui — matérialisme, hédonisme, consumérisme, nationalisme étroit, etc. ... — proclamant à tous un ensemble de vérités morales fondées sur la dignité et les droits humains, l'option préférentielle pour les pauvres, la destination universelle des biens, l'amour des ennemis et le respect inconditionnel de toute forme de vie humaine, de la conception à la mort naturelle; et la recherche de la réalisation la plus parfaite du Royaume dans ce monde, tout en demeurant conscient que, à la fin des temps, Jésus restaurera toutes choses et les retournera au Père » (cf. 1 Co 15,24)." {

{L'ethique dans les moyens de communication sociale", Mgr John Folley Vatican 2000}

mercredi 20 juillet 2016

Le compte Twitter du pape a plus de 30 millions d’abonnés



Le compte Twitter du pape a plus de 30 millions d'abonnés

En tête, les hispanophones et les anglophones

Twitter @Pontifex
Twitter @Pontifex
Le compte Twitter du pape François @Pontifex – en neuf langues – a atteint plus de 30 millions d'abonnés, a annoncé le site proche du Saint-Siège Il Sismografo, le 19 juillet 2016.
En tête, le compte hispanophone (39,89% d'abonnés) suivi du compte anglophone (31,92%). Les « followers » du pape en langue française représentent moins  de 2% du total (584 000). Le compte latin a aussi près de 600.000 abonnés et le compte arabe près de 300.000.
Le compte twitter papal avait dépassé les 10 millions en octobre 2013, près de sept mois après l'élection du pape argentin. Les 15 millions ont été atteints le 18 août 2014 et les 20 millions le 12 avril 2015.
Les messages sont publiés en neuf langues (anglais, italien, français, allemand, arabe, polonais, espagnol, portugais, latin) et sont tirés généralement des interventions publiques du pape.
Le dernier tweet date du dimanche 17 juillet : « N'oublions pas les personnes âgées et les malades qui souvent restent seules l'été, et peuvent se trouver en difficulté. 
JTK

vendredi 15 juillet 2016

Le pape nomme les membres du nouveau Secrétariat pour la communication - La Croix

Le pape nomme les membres du nouveau Secrétariat pour la communication - La Croix

Le pape nomme les membres du nouveau Secrétariat pour la communication

Le nouvel organe créé dans le cadre de la réforme des moyens de communication du Saint-Siège a désormais ses membres, nommés mercredi 13 juillet par le pape François, dont le patriarche maronite.

Pape François, 6 juillet 2016 / GABRIEL BOUYS/AFP

Après avoir changé de porte-parole, le pape François poursuit la réforme des moyens de communication du Saint-Siège en complétant la formation du Secrétariat pour la communication.

Ce nouveau dicastère (équivalent de ministère) de la curie romaine, créé il y a un an et dirigé par l'influent Mgr Dario Vigano, a désormais ses membres attitrés. Le pape en a nommé quinze mercredi 13 juillet.

La composition reflète un souci de représentation géographique. Les évêques nommés proviennent en effet des cinq continents, comme le patriache maronite Béchara Boutros Raï, venu du Liban, ou Mgr John Njue, archevêque de Nairobi (Kenya), le seul africain.

Le cardinal birman, Charles Maung Bo, créé par le pape au consistoire de 2015, représente l'Asie ainsi que l'évêque vietnamien, Mgr Pierre Nguyen Van Khan. Autre cardinal créé par François, Mgr Chibly Langlois, évêque d'Haïti, représente les Amériques ainsi que le cardinal de Curie, l'Argentin Leonardo Sandri, préfet de la Congrégation pour les Eglises orientales.

Européens en nombre

Les Européens siègent en plus grand nombre. Le pape François a ainsi nommé l'évêque de Pontoise, Mgr Stanislas Lalanne, qui fut actif dans la communication de l'épiscopat français et siégeait déjà dans l'ex-Conseil pontifical des communications sociales. Il siégera aux côtés de l'archevêque de Dublin, Mgr Diarmuid Martin, de l'archevêque de Vilnius, Mgr Gintaras Grusas, de l'archevêque de Cadix, Mgr Ginés Ramon Garcia Beltran, et d'un évêque auxiliaire de Lisbonne, Mgr Nuno Bras da Silva Martins.

Le pape a nommé également deux Italiens proches de lui, le cardinal Beniamino Stella, préfet de la Congrégation pour le clergé, et l'évêque d'Albano, Mgr Marcello Semeraro, le secrétaire du 'C9', le conseil entourant le pape pour la réforme de la Curie.

Trois laïcs, dont deux femmes

Trois laïcs siègent aussi dans le nouveau dicastère. Une consultante de l'épiscopat américain, Kim Daniels, un universitaire allemand spécialiste de l'éthique des media, Markus Schächter, et une experte espagnole en communication, Leticia Soberon Mainero, qui participait déjà aux travaux de l'ancien Conseil pontifical pour les communications sociales.

Ces nominations surviennent au moment où les moyens de communication et médias du Vatican (radio, télévision, presse, internet,..) font l'objet d'une rationalisation dirigée par Mgr Vigano.

Sébastien Maillard (à Rome)



JTK

mercredi 13 juillet 2016

Alarmes d’Orient - Issa GORAIEB - L'Orient-Le Jour 13/7/2016

Alarmes d'Orient - Issa GORAIEB - L'Orient-Le Jour

Alarmes d'Orient

D'aucuns le disaient chargé de présents : entre autres largesses, un président flambant neuf, plat somptueux servi sur un plateau d'argent et nappé d'une sauce française alliant avec un surprenant bonheur caviar iranien et dattes d'Arabie. En réalité, Jean-Marc Ayrault n'avait rien d'autre à offrir qu'un vigoureux et fort bienvenu témoignage d'amicale préoccupation, assorti de pressants appels au dialogue interne et au compromis : l'élection d'un chef d'État ne pouvant être, selon lui, que le fruit d'une entente entre Libanais.


La France n'a certes pas les mêmes moyens diplomatiques, économiques et militaires que d'autres puissances. C'est au niveau de l'attachement sincère à la pérennité du Liban qu'elle se classe, en revanche, au tout premier rang des nations. Aux Nations unies, elle se bat, tel un coq gaulois, pour chaque particule des innombrables résolutions relatives à notre pays. Elle est la locomotive du groupe international rassemblant les amis du Liban. Et des centaines de ses fils continuent, depuis des décennies, de risquer leur vie au sein de la force onusienne stationnée à la frontière sud.


Tant de sollicitude traduit aussi, veut-on croire, un certain sentiment de responsabilité envers ce petit pays qu'elle avait façonné de ses propres mains. À plus d'un titre, un Liban privé, depuis plus de deux ans déjà, de président de la République est un ouvrage inachevé, sinon raté. Car il ne s'agit plus, comme en 1943, de rassurer la communauté maronite en lui réservant une place prépondérante dans l'édifice institutionnel libanais.

La gageure, aujourd'hui, consiste à sauvegarder un modèle de coexistence islamo-chrétienne, un symbole menacé d'extinction, dans un Levant en proie à la violence et aux dérives religieuses. Dans ce cadre s'inscrit d'ailleurs la rencontre prolongée qu'a eue hier, à Bkerké, avec les chefs des Églises locales, le ministre français des AE. C'est ce message de solidarité qu'a transmis aux patriarches et évêques le représentant d'une France républicaine, et donc jalouse de sa laïcité, et qui s'alarme néanmoins de l'exode massif des chrétiens d'Orient : qui ne craint pas surtout, comme l'a montré Jean-Marc Ayrault, de clamer son inquiétude.
Inquiète, la France l'est visiblement aussi des retombées de la crise syrienne sur notre pays, qu'est venue aggraver (pour ne pas dire appeler) l'équipée du Hezbollah aux côtés du régime Assad. En incluant la milice dans les nombreux contacts bilatéraux qu'il a eus à Beyrouth, le ministre français a certes fait preuve de réalisme, s'agissant là en effet d'une force politique majeure, première responsable, de surcroît, du blocage de la présidentielle. Il n'empêche que cette entrevue a replacé en mémoire ce flou artistique dont s'entoure l'Union européenne pour classer comme terroriste la seule aile militaire du Hezbollah...


Non moins bizarre – et lourde de périls cette fois – est la politique européenne visant à fixer provisoirement les réfugiés syriens au plus près de leur pays : et à assister financièrement les pays d'accueil, en attendant le jour béni où ces infortunés pourront regagner leurs foyers. Or le minuscule Liban n'est pas un de ces pays fortement peuplés et capables d'intégrer ou d'assimiler, sans grand mal, réfugiés et migrants. Il n'est pas la Turquie, dont le président offre la citoyenneté à ses hôtes en espérant en faire des électeurs reconnaissants : manœuvre déjà opérée à plus modeste échelle, et sans trop s'encombrer de scrupules, par certain ministre libanais de l'Intérieur des années 90. Aucun de tous ces pays ne se voit inviter à héberger une misérable masse représentant le quart de sa population. Abritant de longue date un demi-million de réfugiés palestiniens, c'est bien de ce provisoire qui dure qu'est déjà malade le Liban.

Issa GORAIEB
igor@lorientlejour.com



JTK

De Bkerké, un appel au secours du Liban, discret mais réel - Fady NOUN - L'Orient-Le Jour

De Bkerké, un appel au secours du Liban, discret mais réel - Fady NOUN - L'Orient-Le Jour
13/7/2016

De Bkerké, un appel au secours du Liban, discret mais réel - Fady NOUN

« C'est un appel au secours discret mais réel » que le patriarche maronite a lancé hier en direction de la France, par l'intermédiaire du ministre français des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, estiment des sources proches de Bkerké. Un appel qui ne diffère pas, fondamentalement, de celui que le chef de l'Église maronite a déjà adressé, à diverses reprises, au président François Hollande, qu'il a encore rencontré en avril dernier au Liban et de nouveau le 9 mai à Paris.

« Aidez le Liban de toutes les manières possibles à rester lui-même, un modèle de pluralisme et de tolérance, faites tout pour l'aider à dissocier l'élection présidentielle au Liban du conflit qui déchire la Syrie et de la mortelle rivalité entre l'Iran et l'Arabie saoudite », dit en substance cet appel selon ces sources.
Mais la demande est faite avec la tragique conscience qu'il est peut-être trop tard. Ce quasi-désespoir filtre dans le discours adressé par le patriarche au ministre français : « Il faut reconnaître cependant qu'ils (les groupes et blocs parlementaires libanais) sont déjà dépassés par les interférences régionales. »
L'amertume du patriarche se reflète aussi dans la partie de son mot consacrée aux richesses pétrolières et gazières du Liban qui, dit-il, sont « déjà en voie de spoliation », cette vérité étant laissée en demi-teinte, sans précision sur la partie responsable de cette spoliation : Israël, qui empiète sur notre zone économique exclusive, ou des acolytes libanais qui s'apprêtent à se partager le gâteau. Le patriarche a déjà dénoncé en termes criants la corruption interne de la classe politique libanaise en cette époque de relâchement total de l'autorité centrale de l'État, et il n'est pas impossible que cette ambiguïté soit voulue.

Désertification culturelle de l'Orient
Pourtant, le patriarche ne semble pas vouloir désespérer totalement de la communauté internationale. Le voilà réclamant en effet l'extension de la mission de protection de la Finul aux frontières orientales du Liban. Du relativement nouveau, au moins dans la forme publique que revêt cette demande.
« Église maronite, Église orientale », a encore souligné le patriarche qui revendique « avec ses frères (...) une responsabilité pastorale qui s'étend à tous les pays du Moyen-Orient. Avec ces mots discrets, mais fraternels, le patriarche a de nouveau situé la crise libanaise dans son espace géopolitique, plaçant du coup la France devant une responsabilité aux dimensions de la région et même de l'histoire, tant les enjeux actuels sont porteurs de conséquences lointaines sur l'avenir de la région, avec un risque réel de « désertification culturelle » de l'Orient.
C'est entouré du catholicos de la Maison de Cilicie, Aram Ier, du patriarche des arméniens-catholiques, Grégoire Gabroyan, du chef de l'Église évangélique, le Rév. Salim Sahyouni et de représentants de tous les patriarches orientaux que le patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, a accueilli hier le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, à Bkerké. En guise de témoins, le nonce apostolique et l'ambassadeur de France, Gabriele Caccia et Emmanuel Bonne. Après un tête-à-tête dans le cabinet personnel du patriarche, les deux hommes ont regagné le grand salon où le patriarche a prononcé un mot dont nous reproduisons ci-dessous de larges extraits :

Une France si proche
« Nous nous réjouissons tous que La France en votre personne se fasse si proche de nous, en ces temps critiques que traversent le pays des Cèdres et la région moyen-orientale (...). Nous rappelons avec gratitude aussi ce que la France a pu faire pour aider le Liban dans les dernières décennies (...). Nous apprécions au plus haut point son engagement dans la Finul depuis son déploiement en 1978 au Liban-Sud et nous verrons plutôt d'un bon œil l'extension du service de protection de cette force aux frontières orientales de notre pays.
Votre visite, Monsieur le Ministre, s'inscrit dans le même registre d'attention au Liban. Vous avez déjà manifesté la préoccupation de la France concernant la persistance de la vacance à la tête de l'État depuis plus de deux ans, et la crise politique et institutionnelle dans notre pays (...). Vous avez évoqué aussi les différents contacts avec les responsables iraniens et saoudiens, visant à une sortie de crise et l'élaboration, par les Libanais, d'une solution. Tout en affirmant que les groupes politiques et parlementaires libanais ne peuvent guère abdiquer de leur responsabilité propre en ce domaine, il faut reconnaître cependant qu'ils sont déjà dépassés par les interférences régionales, jusqu'à lier l'élection présidentielle à l'issue du conflit en cours en Syrie et à celui entre l'Arabie Saoudite et l'Iran. Il faut absolument dissocier l'élection présidentielle de ces conflits qui pourraient durer longtemps. »

Un trésor en voie de spoliation
« (...) Actuellement, le Liban a besoin de réédifier les structures de son État pluriel et libre loin de la corruption régnante ; il a besoin de trouver une issue digne au flot de migrants syriens et de réfugiés palestiniens qui l'inonde ; il a besoin d'exploiter dans la transparence le trésor caché, mais déjà en voie de spoliation, de ses richesses naturelles en gaz et en pétrole.
Par ailleurs, avec mes frères les chefs des Églises, notre responsabilité pastorale s'étend à tous les pays du Moyen-Orient et nous partageons les souffrances et les humiliations de nos fidèles en Irak, en Syrie, en Palestine et dans toute la région. Nous sollicitons la communauté internationale pour mettre fin aux guerres et aux actes terroristes qui déchirent nos pays (...). Il nous importe beaucoup de sauvegarder et renforcer la présence chrétienne bimillénaire dans la région. »
À ce discours, le ministre français a répondu par les réflexions suivantes : « Le Liban est un message, il incarne la liberté, le respect, l'équilibre entre les communautés et les composantes du peuple libanais (...). Le Liban peut être un modèle, à condition qu'il parvienne à régler tous les problèmes politiques qu'il affronte. Je suis venu dans une tentative d'offrir une aide pour régler ce problème, pour que les Libanais soient en mesure d'élire un président de la République (...). Tout le monde doit contribuer aux efforts déployés pour régler la crise libanaise et préserver ce modèle.
J'ai dit que la France ne décide pas au nom des Libanais, mais joue le rôle de facilitateur (...). Le parcours singulier du Liban doit être protégé. Voilà le message que je porte (...). »

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JTK

Les médias dans l’ère « de la politique post-vérité »

Les médias dans l'ère « de la politique post-vérité »

Les médias dans l'ère « de la politique post-vérité »


Si chacun a « sa » vérité, la discussion devient automatiquement impossible.

« Est-ce que la vérité compte encore ? »

Katharine Viner, rédactrice en chef du Guardian, a longuement pensé à cette question, et à celles qui en découlent, pendant les semaines qui ont suivi le vote sur le « Brexit », la débâcle de la classe politique britannique et le rôle qu'ont eu les médias dans la diffusion et le décryptage d'informations pendant la campagne.

Le résultat est une très longue analyse qui part du constat que « si les faits étaient une devise, ils viendraient de subir une sévère dévaluation » après ce référendum, le « premier vote majeur dans l'ère de la politique post-vérité », un monde où l'idéologie l'emporte sur la réalité.
La presse eurosceptique britannique a reconnu ses erreurs et ses exagérations, les politiciens pro-« Leave » ont reconnu leurs mensonges et l'absence de toute stratégie en cas de victoire. Mais ils l'ont fait une fois le résultat du vote connu. Comme dit Katharine Viner, ce n'est pas la première fois que le monde politique et celui de la presse se trompent lourdement ou mentent éhontément, mais c'est la première fois qu'ils le reconnaissent si rapidement et si facilement. Comme si la vérité ne pesait plus beaucoup.
Les faits et « les faits »
Boris Johnson, chef de file de la campagne du « Leave ».
L'attirance gravitationnelle du clic

La Vérité, avec un grand V, n'existe pas. Il est impossible d'expliquer les tenants et les aboutissements d'un monde complexe avec des phrases simples, qui seront de toutes façons toujours teintées de subjectivité. Mais il existe quand même une série de faits, démontrables par A+B, à partir desquels un débat contradictoire peut se créer. Pour la rédactrice en chef du Guardian, la campagne du Brexit a montré que c'est de moins en moins le cas. Chacun a « sa » vérité et la discussion devient automatiquement impossible.
« Quand un fait commence à ressembler à ce que vous pensez être vrai, c'est très difficile pour quiconque de faire la différence entre les faits qui sont vrais et les "faits" qui ne le sont pas. »
Le rôle des médias dans cette situation – dire pourquoi cela est vrai ou faux, contextualiser, illustrer – est rendu difficile, voir impossible à la fois par la confiance en chute libre que leur accordent les lecteurs, et par des responsables politiques qui ne se sentent plus obligés de jouer le jeu. Le Guardian rappelle ce que lui a confié Arron Banks, un des principaux financiers du « Leave » après les résultats. En substance : en politique, une campagne politique se gagne par l'émotion et non plus par la démonstration.
« Il s'agissait d'avoir une approche médiatique sur le mode américain. Très tôt, ils ont dit : "Les faits, ça ne fonctionne pas", et voilà. Le camp du "Remain" ne pensait qu'aux faits, aux faits, aux faits, aux faits, aux faits. Ca ne fonctionne tout simplement pas. Vous devez vous connecter émotionnellement avec les électeurs. C'est le succès de Trump. »
Pour Katharine Viner, l'avènement de « l'ère de la politique post-vérité » a été alimenté par celui des réseaux sociaux, là où de plus en plus de personnes, surtout ceux âgés de 18-24 ans, s'informent en priorité.
« De plus en plus, ce qui passe pour des faits n'est qu'un point de vue de quelqu'un qui pense que c'est vrai – et la technologie a permis à ces "faitsde circuler facilement. »
Algorithmes ou systèmes de curation automatique, c'est-à-dire qui sélectionnent l'information que nous consultons et dont on ignore tout, finissent par « nous présenter une vision du monde qui renforce les croyances que nous avions déjà. »
« Cela veut dire que nous avons moins de chances d'être exposés à une information qui nous stimulerait ou élargirait notre vision du monde, et donc moins de chance de tomber sur des faits qui réfuterait des informations fausses partagées par d'autres. »
Rejeter toute la faute sur le Web et les réseaux sociaux serait un peu facile. La presse traditionnelle est aussi en faute et l'autocritique de Katharine Viner vise à la fois son propre média et tous les autres, attirés, presque gravitationnellement, par le trou noir du clic.
« La révolution numérique a fait que les journalistes doivent rendre plus de comptes aux lecteurs – ce qui est une bonne chose (…) Mais si les développements numériques de ces dernières années ont donné de nouvelles possibilités au journalisme, notre "business model" est très menacé, parce que peu importe le nombre de clics que vous avez, ça ne sera jamais assez (…) En chassant le clic facile au détriment de l'exactitude et la véracité, les médias sapent les raisons mêmes de leurs existences. »
La question qui est posée ici est la même que Samuel Laurent des Décodeurs abordait il y a quelques semaines dans Le Monde :
« Face à cette démocratie post-factuelle, la presse est désarmée : que faire, lorsque son lectorat croira plus facilement une information militante, mais partagée par une personne de confiance, que la vérification détaillée effectuée par un média qu'on soupçonne en permanence de toutes les manipulations ?
Comment informer dans ce maelström où tout un chacun est devenu média, puisqu'il peut, lui aussi, partager et diffuser les informations qu'il souhaite ? Comment opposer de la complexité à des visions manichéennes et simplistes du monde ? Et comment faire, par son bulletin de vote, des choix essentiels pour tout un pays lorsque l'on n'est pas informé correctement des conséquences ? »
La réponse ? Aller chercher les informations fausses là où elles existent et sont partagées, et les « débunker », écrit Katharine Viner. C'est ce qu'on attend des « médias fiables ». Les Décodeurs sont sur la même ligne :
« On peut, et nous le faisons chaque jour, expliquer, vérifier, préciser, démentir les rumeurs. Encore faut-il que ces analyses soient lues et relayées auprès du plus grand nombre, ce qui n'est pas toujours le cas. On doit, on devra, à l'avenir, éduquer aux médias, à l'information, pour mieux armer les citoyens contre la manipulation d'où qu'elle provienne. »


JTK

mardi 12 juillet 2016

Élie Salibi, départ d’un grand maître du petit écran - M.H.G. - L'Orient-Le Jour

Élie Salibi, départ d'un grand maître du petit écran - M.H.G. - L'Orient-Le Jour

Élie Salibi, départ d'un grand maître du petit écran - M.H.G.

Le monde des médias – et tout particulièrement de la télévision – au Liban a perdu hier l'un de ses monstres sacrés, Élie Salibi, qui s'est éteint à l'âge de 75 ans. Avec sa voix inimitable et sa plume sensationnelle, l'homme constituait une autorité de référence pour nombre de journalistes et de grandes figures médiatiques.
Né en 1941 à Souk el-Gharb, dans le caza de Aley, Élie Salibi a accompagné le développement du secteur médiatique libanais durant près de six décennies. Il a, entre autres, occupé les postes de présentateur, rédacteur et conseiller dans plusieurs chaînes de radio et de télévision entre 1962 et 2008, notamment à la Voix du Liban, la LBCI, la LBCI-Sat, Orbit, Voice of America et Radio Liban.

Mais il a aussi et surtout été le témoin de la grandeur et de la décadence des médias libanais, de plus en plus minés, au fil du temps, par la censure et l'hyperinterventionnisme politico-financier.
Après des débuts à la radio, notamment à la BBC, toujours étudiant, il était entré, à la suite des encouragements de Hind Abillamaa, à l'ancêtre de Télé-Liban, Télé-Orient – rivale de la Compagnie libanaise de télévision (CLT) – lors de sa création en 1962, sous le mandat Chéhab. L'occasion pour le jeune homme de faire ses premières armes et de découvrir notamment le monde de la censure et des contrôleurs du ministère de l'Information. Un jour, l'un deux se présente ainsi en état d'ivresse à la chaîne de télévision et demande à contrôler et censurer... la météo, craignant que l'ennemi « ne puisse profiter » des précieuses informations fournies par le bulletin pour « attaquer le pays ». Il menacera même le jeune journaliste d'un procès au cas où il refuserait d'obtempérer !

Autre épisode de ses démêlés de l'époque avec la censure, lorsque Kamal Joumblatt, à l'époque ministre de l'Intérieur, décide en 1963 d'interdire à Johnny Halliday d'entrer au Liban, où l'icône rock de l'époque doit se produire en concert. Élie Salibi, présent au salon de l'aéroport, propose aussitôt au ministre un entretien en direct à la télévision durant le journal télévisé. Ce à quoi Kamal Joumblatt, laconique, répond par la positive, en anticipant toutefois qu'une rupture de courant empêchera l'entretien d'avoir lieu... Au grand étonnement du journaliste, à 20h30 précises, le courant électrique se coupe effectivement. Élie Salibi a commis l'erreur d'annoncer l'entretien à l'avance et le Deuxième Bureau, en conflit perpétuel avec le ministre, veille au grain !

Les temps sont aussi ceux de la concurrence avec la CLT et, le 22 novembre 1963, Élie Salibi annonce, avec à l'esprit la volonté de prendre de vitesse la chaîne rivale, le décès de Béchara el-Khoury durant le journal télévisé... Or l'information, erronée, provient du Deuxième Bureau. Quelques instants plus tard, le fils du président, Khalil el-Khoury, l'appelle pour démentir la nouvelle. Et, le soir même, John Fitzgerald Kennedy est assassiné. Traumatisé, Élie Salibi n'annoncera pas l'information, craignant de commettre, ce faisant, une nouvelle erreur. Tout comme il n'annoncera pas le décès, bien réel cette fois, de Béchara el-Khoury quelques mois plus tard, le 11 janvier 1964, par peur d'une récidive...

Ayant quitté Télé-Orient en 1977, Élie Salibi intègre la LBC en septembre 1986, à l'instigation de Karim Pakradouni. Il y devient rédacteur en chef du journal télévisé. Il y restera jusqu'en 1992, le temps de former toute une génération de professionnels, mais aussi de se rendre compte de la progression extraordinaire de la relation de moins en moins professionnelle entre politiciens et journalistes, qu'il ne cessera de dénoncer. Il rejoindra ensuite la LBCI-Sat à partir de 1996, avant d'assumer les fonctions de conseiller du PDG de la chaîne, Pierre Daher, une aide précieuse et appréciée. Écrivain au style littéraire puissant, fort d'un esprit critique brillant et lumineux, il était également l'auteur de plusieurs ouvrages.

Hier, les hommages ont plu sur les réseaux sociaux pour le professeur, le maestro, de la part des générations qu'il a formées, notamment de May Chidiac, Gisèle Khoury, Bassam Abou Zeid, et tant d'autres journalistes, un ultime geste de reconnaissance et de gratitude – mais aussi de nostalgie pour un âge d'or décidément révolu – avant le grand silence.

*Source : May CHIDIAC, La Télévision mise à nu, aux éditions L'Orient des Livres, 2014.



JTK