Congrès mondial de la presse catholique - PCCS 6 octobre 2010
Antoine-Marie Izoard
Directeur de l'Agence I.Media
Internet : un défi pour la presse catholique
Cette 3e journée sera plus particulièrement consacrée à Internet et, même si nous en avons déjà un peu parlé au fil des différentes interventions, nous allons nous concentrer ce matin sur le défi que représente la toile (le web) pour la presse catholique.
Ce défi à relever sera au centre de mon intervention.
Avant de rentrer dans le vif du sujet, permettez-moi de présenter le media pour lequel je travaille, l'Agence I.Media.
Agence de presse en langue française, elle est la seule agence de presse professionnelle à suivre exclusivement l'actualité du Vatican. Comme agence de presse, elle s'adresse uniquement aux journalistes et aux institutions, elle diffuse ses dépêches sur abonnement, y compris aux plus grandes agences de presse mondiales.
Nous assurons en plus un certain nombre de correspondances pour la presse hebdomadaire, la radio et la télévision.
I.Media n'est pas un 'media d'Eglise', mais appartient au groupe éditorial franco-belge Media Participations, groupe éditorial tourné vers un large public familial à travers la bande dessinée, les livres pour enfants, les revues, l'audiovisuel, mais aussi - dans le domaine religieux - grâce aux éditions Mame, à l'hebdomadaire Famille Chrétienne et au mensuel de la prière Magnificat.
Je ne suis donc pas à proprement parler un journaliste catholique, mais un catholique journaliste...
J'arrive donc à mon sujet en prenant pour exemple Famille Chrétienne et Magnificat qui ont résolument fait le choix d'Internet et des nouvelles technologies.
Famille Chrétienne a ainsi développé un site Internet pour le grand public pourvu d'un espace dédié à des abonnés, avec un certain nombre de services en ligne.
Magnificat, pour sa part, a développé une 'application' pour iPhone en France et aux Etats-Unis et propose ainsi de recevoir les textes de la liturgie, les prières de chaque jour, des thèmes de méditation et des vies de saints.
Le téléphone devient ainsi un bréviaire électronique pour accompagner la prière quotidienne. Sur cette voie, Magnificat sera bientôt suivi, en France, par son grand frère, Prions en Eglise, qui appartient pour sa part au groupe Bayard.
Nous en parlerons d'ici peu, il existe évidemment sur la planète une véritable 'fracture numérique' mais, partout, Internet est en constante progression.
Si les foyers qui possèdent Internet sont légion en France
(6 Français sur 10 ont accès à Internet),
il faut savoir que parmi
les Français en possession d'un téléphone mobile, 1 sur 5 possède un téléphone dit 'intelligent' : les iPhone, BlackBerry et autres.
En tous lieux, à tout moment, leurs utilisateurs sont connectés à Internet.
Aussi, plusieurs medias catholiques et des diocèses ont développé des applications permettant de rester en ligne 'avec le Ciel' par le téléphone.
Ainsi, certains lisent la Bible ou s'associent aux opérations caritatives du Secours Catholique à travers leur téléphone mobile.
Des initiatives qui font écho, en quelque sorte, à l'exhortation de Benoît XVI, en avril dernier, qui invitait à "avancer sans peur au large, sur la mer numérique, en affrontant la navigation ouverte avec la même passion qui depuis 2000 ans gouverne la barque de l'Eglise" (Discours aux Congrès de la CEI sur les 'Témoins numériques').
Bien sûr, Internet a révolutionné le travail de la presse, et surtout le 'facteur temps' du travail journalistique.
Ainsi, comme de véritables bombes, des informations (fausses ou vérifiées) 'tombent' sur le web et se propagent en un instant dans le monde entier.
En suivant l'actualité du Vatican au quotidien, en agence de presse, je suis le témoin (et parfois l'un des acteurs) de ce bombardement continuel.
Je voudrais m'arrêter maintenant sur trois caractéristiques d'Internet :
-Internet crée l'information,
- Internet libère l'information,
- Internet corrige cette information.
1-Internet crée l'info : C'est désormais un mécanisme placé devant les yeux de tous : Internet passe devant l'ensemble des autres media en matière de première diffusion d'une information.
C'est aussi une extraordinaire (et parfois inquiétante) caisse de résonance de l'information, ne serait-ce qu'à travers les blogs qui peuvent par contre se transformer en autant de 'chapelles numériques'.
Comme les autres, les journalistes de la presse catholique sont désormais convertis a une espèce de 'bi- ritualisme' professionnel :
il devient en effet difficile de dire désormais d'un journaliste qu'il ne travaille que pour la presse écrite ou que pour Internet.
Permettez que je pousse la comparaison avec la liturgie de la messe et le récent Motu Proprio sur la messe traditionnelle : plus que bi-ritualistes, les journalistes doivent aujourd'hui travailler dans un seul 'rite' journalistique mais dans deux formes différentes...
-2e point, Internet libère l'information : A condition, bien sûr, d'un accès à Internet, l'accès à l'information est devenu incroyablement riche :
Internet n'est plus une vitrine mobile ou un journal que l'on déplace avec la souris de l'ordinateur, mais aussi une télévision, une radio, un media interactif.
Mais cette 'démocratisation' de l'information exige aussi que le lecteur soit doté de filtres, d'une capacité à choisir tel ou tel site plutôt que tel autre en fonction de ce critères qualitatifs.
C'est là une chance pour la presse catholique en particulier.
Elle peut ainsi proposer une autre lecture de l'information, y compris sur Internet.
-3 Internet, enfin, corrige l'information : Lors de son récent voyage au Royaume- Uni, Benoît XVI a vanté le 'rôle correctif' de la religion dans la vie publique.
A une tout autre échelle, il en va de même d'Internet dans le monde de l'information, pour peu qu'on le veuille réellement.
Media supplémentaire et complémentaire, Internet est donc un canal qui permet, au-delà des éditions 'papier', de proposer une valeur ajoutée.
De nombreux sites de la presse catholique proposent ainsi de lire une interview complète (lorsqu'elle n'entre pas dans la version papier par manque d'espace), ou des photos supplémentaires, des fiches techniques ou encore des dossiers thématiques.
C'est une chance pour la presse catholique qui peut alors traiter des sujets parfois complexes et délicats avec plus d'ampleur et d'espace, avec qualité.
D'autant que les temps de lecture sur Internet explosent littéralement. Sans parler des commentaires des internautes qui viennent enrichir (le plus souvent) un article, à condition d'être soumis à une attentive mais bienveillante modération.
Je vais vous faire un aveu... J'étais aussi censé vous parler du financement d'Internet dans la presse catholique.
Je m'en tirerai avec un bref constat.
Internet est loin d'être le plus coûteux des media.
Le professionnalisme de ceux qui y contribuent y coûte souvent plus cher que le media lui-même.
Mais Internet, en général, rapporte peu.
La presse diocésaine doit donc s'approprier ce media peu coûteux (en général) et bien plus rapide que les media diocésains traditionnels pour diffuser son information.
Internet est devenu, bien souvent, le premier lieu de publication du contenu de la revue diocésaine.
Pour autant, ce nouveau media peut être au service d'une plus grande et plus rapide communion.
Attention cependant, d'autres l'ont dit ici avant moi, la presse catholique, sur Internet ou ailleurs, a besoin de professionnels.
Les grands quotidiens de la presse catholique ont aussi fait le choix d'une vitrine sur Internet. En France, dans un panorama de la presse moribond, La Croix réfléchit en ce moment à la création d'un site en partie payant.
D'autres grands quotidiens généralistes ont déjà fait le pas :
Le Monde (qui a désormais développé une véritable clientèle sur le web) et Le Figaro (qui, en plus de l'information, propose des services et des dossiers d'approfondissement, ainsi qu'une version business).
Je vous l'ai dit, des media de mon groupe comme Famille Chrétienne et Magnificat ont parié sur Internet.
Si les abonnements vont croissant, les résultats financiers du numérique ne crèvent pas le plafond !
Le chiffre d'affaires publicitaire est en progression, mais Internet doit être vu également comme un media d'appel pour de nouveaux lecteurs, de rappel aussi pour ceux qui peuvent ainsi garder le contact avec un titre de la presse et se réabonner un jour.
- Certains media vont aussi vers une formule associant le 'papier' et Internet, une formule où l'abonné continue de recevoir son journal préféré mais possède aussi un accès privilégié sur Internet pour des informations et des sites complémentaires.
S'il en était besoin, j'espère vous avoir convaincu que la presse catholique ne peut se passer d'Internet.
La présence catholique sur le web, et de la presse catholique en particulier, me semble d'autant plus indispensable aujourd'hui alors que l'Eglise est assaillie de toutes parts, en proie aux petites phrases chocs, aux polémiques et aux titres réducteurs de la 'grande' presse qui, bien souvent, connaît bien mal les réalités de l'Eglise.
La réactivité des médias catholiques est donc essentielle, leur présence sur le web est aujourd'hui le premier moyen de proposer la Vérité de l'Eglise aux Internautes.
Pour conclure, je ferai le pari que si saint Paul revenait marcher sur nos routes il écrirait une Lettre aux Internautes.
Plus sérieusement... Comme nous y a invité Benoît XVI dans son dernier Message pour la Journée mondiale des Communications sociales, sachons "saisir avec sagesse les singulières opportunités offertes par la communication moderne".
JTK = Envoyé de mon iPad.
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